• Chapitre 16

    Je suis de retour dans ma chambre. Les cours d'aujourd'hui sont terminés, et les élèves ont tous dîné. Ma chambre est telle que je l'ai laissée. Je marche un peu. Malgré le fait que le sang ait été nettoyé son odeur est encore présent dans toutes la chambre, me donnant la nausée. Je me dirige vers la fenêtre, écarte les rideaux et l'ouvre. L'air froid de la nuit me pique le visage. Je respire. Je contemple le paysage plongé dans l'obscurité de la nuit. Quelqu'un toque. Je soupire et me dirige vers la porte. Je tourne la poignée et l'ouvre. Je reste interdite. Devant moi se trouve Alexandre. Je le regarde, avant de dire:

    "-Les garçons sont interdis dans ce dortoir à cette heure-ci. Qu'est-ce que tu viens faire ici?

    -J'avais à te parler."

    Je le dévisage, et reprends:

    "-Reste pas planté comme un idiot. Entre, j'imagine que l'on peut faire une exception."

    Il me dévisage à son tour, hésite et finit par entrer. Je ferme la porte derrière lui.

    "-Donc de quoi voulais tu me parler? Je te préviens, si tu es là pour me faire la morale tu peux repartir tout de suite.

    - Eh bien c'est dommage puisque c'est en partie pour ça que je viens te voir et je ne compte pas m'en aller avant d'avoir terminé notre petite discussion.

    - Tu es vraiment quelqu'un de têtu.

    - Je vais prendre ça comme un compliment.

    -Ne tourne pas autour du pot et rentre dans le vif du sujet s'il-te-plait, je ne veux pas y passer la nuit.

    - Dans ce cas, je vais être très clair. Pourquoi as-tu tenté de te suicider?

    -Pour une raison assez simple, parce que je devais mourir ce jour là, il y a huit ans, en même temps que mes parents et que mon ami. Voilà pourquoi je veux mourir mais tu n'as strictement aucune idée de ce que c'est que de voir la mort de ses propres yeux. Ce sentiment d'impuissance, tu ne le connais pas."

    Je me sens vidée, le souffle saccadé, les yeux embués de larmes, je le regarde. Il reste calme, les yeux posés sur moi et reprend:

    " - Je le connaîs.

    - Je ne comprends pas.

    - Je ne peux pas comparer nos histoires, ni même prétendre avoir souffert autant que toi mais je l'ai connu ce sentiment d'impuissance. Moi aussi j'ai vu la mort."

    Il s'arrête puis continue:

    "- Il y a cinq ans mon père m'a emmené voir un match de baseball pour fêter mon anniversaire. Ma mère était restée à la maison pour garder mes deux sœurs. Tous se passait bien, nous avions eu de belles places et l'équipe que l'on était venu supporter avait gagner le match. Nous avons repris la voiture pour rentrer. Nous avions pris l'autoroute pour rentrer plus vite. Le camion qui était devant nous à freiner brusquement et nous sommes entrés en collision. Mon père est mort sur le coup et moi j'ai survécu."

    Je n'ose pas parler. Par chance il reprend la parole:

    "-Tu n'es pas la seule à avoir un passé douloureux. Et lorsque cela arrive, deux choix s'offrent à toi, soit tu acceptes d'affronter la réalité et tu te bats pour vivre, soit tu restes là à te morfondre."

    Il se met à fouiller dans sa poche, et sort un objet emballé dans un mouchoir. Il me le tend:

    "- Je te laisse faire ton choix."

    Je le déballe. Une lame scintillante. C'est mon couteau suisse. Mon regard va du couteau à Alexandre et je lui réponds:

    "- Pourquoi ?

    - Ce n'est pas aux autres de décider pour toi mais il y a toujours des personnes qui tiennent à toi.

    -Je peux te poser une question?

    -Tu es déjà entrain de m'en poser une donc continue.

    -Pourquoi tu as continué de te battre?

    -Parce que il y avait encore des personnes qui tenaient à moi. Et toi, que comptes-tu faire?

    -Je ne sais pas, tout le monde à pitié de la pauvre petite fille qui a perdu ses parents. Il n'y a personne qui tienne vraiment à moi. Mes amis m'ont tourné le dos après ce qu'il s'est passé.

    -Sophie ne te tournera pas le dos.

    -Elle a pitié de moi.

    - Elle n'a pas pitié de toi, elle s'inquiète pour toi, tout comme je m'inquiète pour toi."

    A peine a-t-il prononcé ces mots qu'il me prend dans ses bras et ajoute:

    "-Sophie et moi sommes tes amis et on ne te tournera pas le dos."

    Il me lâche puis se dirige vers la porte avant de me dire au revoir. Il ferme la porte et le bruit de ses pas s'évanouissent dans le couloir. Je m'adosse à un mur. Qu'est-ce qu'il vient de se passer?

     


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